Nausicaä de la Vallée du Vent (Manga & Film d’animation)

Créations artistiques et œuvres de fiction

Date de parution : 29.04.2009
Auteurs.trices : Hayao Miyazaki
Média / Organisation : Hayao Miyazaki, Glénat, Animage, Topcraft
Langue : Français, 日本語, English

Payant

Hayao Miyazaki est un animateur, réalisateur, producteur, scénariste, écrivain et mangaka japonais. Cofondateur du Studio Ghibli avec Isao Takahata, il obtient une renommée internationale grâce à son talent de conteur et ses films d’animation japonais, parmi lesquels : Princesse Mononoké (1997), Le Voyage de Chihiro (2001), ou encore Le Château ambulant (Il est considéré comme l’un des cinéastes les plus accomplis de l’histoire de l’animation.

Né dans le quartier de Bunkyō à Tokyo, Miyazaki s’intéresse très tôt aux mangas et à l’animation. Pendant ses premières années au studio (chez Toei Animation à partir de 1963), il travaille comme intervalliste et collabore ensuite avec le réalisateur Isao Takahata. Il fournit des d’abord des animations clés pour différents films, puis coréalise, et devient animateur à part entière. En 1979 il rejoint la Tokyo Movie Shinsha en 1979 pour réaliser son premier long métrage Le Château de Cagliostro ainsi que la série télévisée Sherlock Holmes. À la même époque, il commence à écrire et à illustrer le manga Nausicaä de la Vallée du Vent (1982-1994).

Voilà comment Hayao Miyazaki introduit en 1982 les premières planches du manga : “L’histoire de Nausicaä, une fille vivant dans une époque chaotique, 1 000 ans après l’effondrement de la grande civilisation industrielle.”

Présentation de l’œuvre :

L’humanité, dans son orgueil démesuré, a précipité le monde dans un désastre écologique sans précédent. Les grandes civilisations industrielles jadis florissantes ont connu un déclin fulgurant. Mille ans après la guerre des « Sept jours de feu », la terre n’est maintenant plus qu’un immense désert sur lequel s’étend la « Mer de la décomposition », une forêt toxique habitée par des insectes géants. Les hommes, réduits à subsister aux rares abords préservés de cette forêt, vivent dans des royaumes qu’ils ont fondés localement. L’espèce humaine est menacée par l’expansion de la « Mer de la décomposition », mais les peuples continuent à se battre pour s’approprier les portions de terres encore habitables. Une guerre est sur le point d’éclater entre les empires Tolmèque et Dork. En vertu d’un vieil accord, Nausicaä, la princesse du petit royaume de la Vallée du Vent, doit quitter sa vallée pour rejoindre l’armée Tolmèque prête à envahir les terres Dorks.

Rien ne sera simple… Quels sont les véritables motifs derrière cette guerre ? Pourquoi Kushana, la fille de l’empereur Tolmèque a-t-elle fait détruire Pejite, cité pourtant alliée des Tolmèques ? Que craignent les Ômu, ces grands insectes protecteurs de la Forêt, au sud ? Quels secrets terrifiants reposent dans la crypte de la ville sainte Dork de Shuwa ? Telles sont quelques-unes des nombreuses questions que se poseront Nausicaä et ses compagnons emportés dans une incroyable quête. Une quête tumultueuse, tour à tour humaine, scientifique et spirituelle, au cours de laquelle Nausicaä cherchera désespéremment à sauver des vies, à guérir les blessures et à apaiser les souffrances provoquées par la folie des hommes.
Première et seule véritable bande dessinée de Hayao Miyazaki, Kaze no Tani no Naushika (Nausicaä de la Vallée du Vent) est un monument incontournable et inoubliable du 9ᵉ art qui dépasse le cadre du divertissement. C’est une épopée magnifique et profonde, le genre d’œuvre qui peut changer notre perception du monde et un exemple pour les générations futures.

Plus d’info :

C’est également une œuvre originale de par son processus de création, sa réalisation et sa publication : son format, en A4, est relativement rare dans l’histoire du manga et aurait pu permettre à Hayao Miyazaki de grands moments de contemplation et d’étirement de l’action. Pourtant, Nausicaä casse ce schéma récurrent du genre pour proposer au contraire une action dense, complexe, fouillée, parfois même à la limite du compréhensible. Au fur et à mesure des tomes et des années, on remarque un trait de plus en plus incisif et précis, des dialogues riches et profonds, un découpage époustouflant. Le mangaka mettra 12 ans, de 1982 à 1994 à aboutir l’histoire : « j’ai commencé à dessiner le manga parce que j’étais sans emploi en tant qu’animateur, et j’arrêterai de le dessiner quand je trouverai un travail dans l’animation » avait déclaré Miyazaki suite au succès des premiers chapitres diffusés par Animage.

Ironie de l’histoire, c’est pour adapter justement Nausicaä en film que le réalisateur fait un premier break. Il continue par la suite à travailler sur son manga de manière intermittente, avec de longues périodes d’interruption correspondant à la réalisation de ses différents long métrages. Ainsi les 16 premiers chapitres du manga (représentant les deux premiers tomes, sur les 7 que connaîtra Nausicaä), ont servi d’inspiration au premier long métrage d’animation qu’ait écrit et réalisé Hayao Miyazaki, produit par Topcraft. Résultat : le film Kaze no Tani no Naushika (Nausicaä de la Vallée du Vent, 1984) est une de ses œuvres-clef, et a marqué durablement l’histoire de l’animation japonaise ; plus de trente ans après leur création, le film et son héroïne emblématique restent une référence gravée dans les cœurs de tous les fans.
Ainsi, loin d’une diffusion hebdomadaire dans des journaux comme ses collègues mangakas, Miyazaki produit le manga en parallèle de sa carrière de réalisateur : Le château dans le ciel (1986), Mon voisin Totoro (1988), Kiki la petite sorcière (1989), et finalement Porco Rosso (1992), ponctueront l’écriture de Nausicaä, dont le dernier chapitre est publié en mars 1994 — avant que l’auteur ne se lance dans l’écriture et la réalisation de Princesse Mononoké (1997). Au-delà du fait que le manga ait dès le départ été pensé en vue de son adaptation en film d’animation, ce chevauchement entre les deux métiers d’Hayao Miyazaki explique aussi probablement l’aspect très cinématographique de la mise en scène de Nausicaä, presque équivalent à un story-board, où les détails foisonnent, les variations de plans sont multiples et l’action très dense. Néanmoins, des différences persistent :

Pour le film Miyazaki épure volontairement l’histoire en axant l’intrigue sur la Vallée du Vent et le message écologique, ne conservant finalement que certaines scènes à fort pouvoir émotionnel. Le cadre général demeure la Vallée du Vent, victime innocente au milieu d’une guerre sanglante. Nausicaä change certes l’issue de cette dernière, mais ne résout finalement pas vraiment l’énigme de fond de la « Mer de la décomposition ».

Tandis que le manga, dès les deux premiers tomes, présente un monde plus complexe, avec une guerre aux multiples alliances, rebondissements et facettes. Nul doute que ce format ait permis à Miyazaki, bien plus que n’importe lequel de ses films, de creuser en profondeur la nature humaine, d’en sonder véritablement les tréfonds, dans ses bons comme dans ses mauvais aspects. Il a pu également à travers ses 7 tomes proposer une réflexion profonde sur la vie, notre lien à la Nature, de manière bien plus poussée qu’un « simple » pamphlet écologique.

Analyse :

Pour être plus précis, Nausicaä plonge plus ses racines dans les romans de science-fiction que dans les annales du manga. C’est ainsi que l’univers des maîtres-vers, l’utilisation du Moeve ou encore le thème du messie, du désert ou des insectes ne peut qu’évoquer la saga de Franck Herbert, Dune. La longue quête initiatique et douloureuse de Nausicaä rappelle plus quant à elle, celle de Frodon dans Le seigneur des Anneaux, avec notamment ce fardeau permanent de porter le poids du monde sur ses frêles épaules. Enfin, et ceci n’est plus un secret depuis quelques années, Miyazaki est un grand fan de l’univers de Terremer et d’Ursula K. Le Guin. La différence par rapport à ces chefs-d’œuvre de la science-fiction et de la Fantasy, c’est que Miyazaki choisit d’ancrer son action dans un univers « réel », dans le sens où l’on apprend dès le début que nous sommes sur Terre, dans un monde postapocalyptique, et plus précisément sur le continent Eurasien. De fait : la technologie, le mode féodal, les croyances et les armures Tolmèques rappellent très certainement le continent européen, et de nombreux indices laissent à penser que le territoire Dork, lui, est plutôt asiatique, et évoquent irrésistiblement ceux du bouddhisme.

Miyazaki utilise habilement des petits détails pour rendre son univers cohérent et crédible. Si l’œil novice passe outre et dévore les pages en quelques heures, nul doute que ces diverses sources et inspirations trouvent indirectement un écho en lui et une force évocatrice certaine.

Par ailleurs, cette œuvre-fleuve, écrite sur près de 14 ans, peut-être perçue comme le symbole et la trace de l’évolution de Miyazaki : du film Nausicaä de la Vallée du Vent, optimiste et porteur d’espoir, on passe au personnage de Porco Rosso, ce vieux cochon misanthrope placé lui aussi au cœur d’un conflit meurtrier. Cette évolution indique-t-elle un abandon des croyances idéologiques de Miyazaki, un refus de l’idéalisme et une vision plus pragmatique de l’humanité ? Miyazaki dit lui-même qu’il a cessé de croire au marxisme au cours de la création de cette œuvre : “J’ai arrêté de voir les choses en « classes » parce que c’est un mensonge de dire qu’on a raison seulement parce qu’on est travailleur manuel” (Now, after Nausicaä has finished, Yom, juin 1994). Pourtant, derrière cette vision pessimiste de la destinée humaine se cache une vision finalement nettement moins sombre. Car Nausicaä choisit finalement la vie, dans toute son imperfection dans toute son éphémérité, dans toute sa fragilité. Elle choisit d’accepter ce qui est profondément naturel : la mort, comme formant un tout avec la vie.

Il est difficile de ne pas faire un lien entre cette fin et celle de Princesse Mononoke, réalisé juste après par Miyazaki. Dans ces deux mondes où l’humanité semble courir à sa perte, avide de pouvoir et prête à détruire la nature pour parvenir à ses fins, deux personnes luttent contre ces forces destructrices. Nausicaä, elle, remporte finalement son pari et son monde, bien que ravagé par la guerre, est préservé. L’homme reprend sa place de maillon dans la chaîne de la vie et ne décidera plus du sort de la Nature. Mais Ashitaka, lui, ne peut sauver le monde ancien. Dans Princesse Mononoke, le constat semble amer : l’homme ne peut vivre au sein de la Nature et c’est pourquoi Ashitaka et San ne peuvent pas se retrouver. Là où Nausicaä replace l’homme au sein de la nature, Princesse Mononoke le place en maître d’un monde défiguré et changé à jamais. Nausicaä reflète donc l’évolution de la pensée de son créateur : d’un optimisme idéaliste, l’œuvre devient de plus en plus sombre et complexe. En perdant ses idéaux, Miyazaki porte un regard désabusé et distant sur le sort de notre humanité : qu’adviendra-t-il au monde de Nausicaä ? Nul ne le sait… La fin du manga est finalement typique des œuvres de Hayao Miyazaki : sans porter aucun jugement, le mangaka propose une fin ouverte qui ignore le manichéisme.

Conclusion :

Une fois les dernières pages du manga tournées, une fois le dernier tome fermé, le lecteur n’a qu’une envie : retourner partager les aventures de la princesse de la Vallée du Vent. Il est difficile d’abandonner ces compagnons de voyage, ce monde si riche et complexe, ces terres à la fois lointaines et proches. Quant à Nausicaä, il s’agit certainement d’un des plus beaux personnages de la littérature : elle nous fait simplement grandir. Mais ce qui fait finalement la force de l’œuvre, c’est que loin de proposer un monde manichéiste et une fin à l’optimisme béat, elle nous renvoie à un questionnement profond et intime : qu’est-ce que la vie ? Qu’est-ce que la nature ? Quel rôle l’homme peut-il jouer dans ce monde, tant de manière individuelle que collective ? À toutes ces questions, Hayao Miyazaki ne propose que quelques subtiles esquisses, à nous de trouver les réponses…

(Source : https://www.buta-connection.net)

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