[MISSION BIOSPHERE] Semaine 14

Carnet de bord

Le 20 février 2018, Nomade des Mers a lancé la phase 2 de son exploration low-tech : La Mission Biosphère, ou 4 mois en autonomie grâce aux low-tech. Chaque semaine, Corentin nous partage son journal de bord.

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Les grillons de la bigbox1 commencent à chanter. La bigbox devient une jukebox. Il ont 37 jours. Au fond de la boite, il y a de nombreux cadavres. Je ne sais pas quelle peut être la cause. J’espère que ce n’est pas une maladie qui se propage.

2

JOUR 89
Les feuilles ne reçoivent qu’un mince filet de solution nutritive. Pour que le niveau ait le temps de monter plus haut dans les gouttières, je décide de doubler toutes les durées de la minuterie. Son cycle sera désormais de 10 minutes au lieu de 5. L’arrosage durera 4 minutes toutes les 10 minutes au lieu de 2 minutes toutes les 5 minutes. Comme l’écoulement dans les gouttières est plus lent que le débit de la pompe, le niveau de solution nutritive sera plus haut. J’espère qu’ainsi les racines seront mieux immergées et que les plantes iront mieux.
Le dessalinisateur n’a pas fini de me poser des problèmes. La pompe ne marche pas tout le temps. Elle n’est peut être pas assez puissante pour élever l’eau à 1,5m.
Depuis l’abandon de la cachupa, je suis à la recherche d’un nouveau plat du terroir. Je crois avoir découvert une bonne piste. Faire revenir dans de l’huile grillons et cacahuètes concassées. Y ajouter ensuite très rapidement les légumes feuilles à la manière de la cuisson au wok. Mettre de côté. Faire griller le maïs préalablement cuit jusqu’à ce que les grains deviennent élastiques. Mélanger le tout. Ajouter de la spiruline mélangée à de la menthe finement hachée et de jeunes pousses. À manger matin, midi et soir.
J’aime la simplicité de la Biosphère. Avec l’habitude je trouve pleins d’avantages au peu de diversité de loisirs, de nourriture, d’objets et d’environnement. Ce mode de vie épuré me permet de mieux focaliser mon attention sur les sujets qui m’intéressent. Des sujets de réflexion que je n’ai jamais eu le temps de traiter. Comme une multitude de dossiers ouverts en attente que je me penche un jour dessus. J’ai l’impression de progresser.
Je crois que je suis atteint de minimalisme.

JOUR 90
Il reste 30 jours avant la fin de la mission. C’est la dernière ligne droite. La Biosphère est maintenant à peu près stable : je n’envisage pas de chantier de modification des élevages et cultures. La phase de développement aura finalement duré 3 mois. Beaucoup plus que ce que j’avais prévu. Ce retard est principalement la conséquence des problèmes d’hydroponie et de filtration de spiruline. Les données que je vais mesurer pendant ce dernier mois seront les plus importantes car ce sont celles qui me donneront les rendements de chaque système en vitesse de croisière.
Des nuages m’empêchent de tester le dessalinisateur.
Ma première action contre l’emballement de l’écosystème est de nettoyer la bigbox1. En déplacant les boites d’oeufs je découvre que le dernier orage a formé un tapis de nourriture boueuse au fond. Elle est pleine de cadavres de grillons. Il y a aussi des vers. Surement des larves de mouches (source de pas mal d’énervements). Je nettoie tout et replace les boites d’oeufs. Ils ont maintenant un habitat plus propre et confortable.
Je lis que les mouches sont si agaçantes car elles veulent se poser sur ma peau pour se nourrir de sels minéraux dégagés par ma sueur.
J’ai l’impression qu’imaginer manger un pain au chocolat déclenche le même plaisir que le manger réellement. Je ne m’en prive pas. Je me fais de bons petits déjeuners imaginaires. Ce matin : gâteau (mi-cuit) au chocolat trempé dans du yaourt nature. Avec un bon café corsé.

JOUR 91
J’installe à nouveau un système de siphon avec un bidon perché car la pompe ne marche pas. Cette fois je fais en sorte qu’il ne puisse pas chuter.

3

La suite de mon plan pour reprendre le dessus sur l’écosystème est un grand nettoyage du camp et de la zone située tout à l’avant de la plateforme.
J’y passe une bonne partie de la journée. Il restera à traiter le problème des eaux stagnantes. Je pense que les moustiques, qui sont de plus en plus nombreux et agressifs, même en pleine journée, y pondent leurs oeufs. Je suis leur seule source de sang dans les parages. Je sens bien qu’ils comptent beaucoup sur moi.
Je vois régulièrement de tout petits papillons dans les systèmes d’hydroponie. Je pense que ce sont principalement eux qui pondent des chenilles sur les feuilles. cela ne servirait à rien de mettre mes filets, les mailles sont trop grandes. Les mini chenilles ne font pas beaucoup de dégâts car elles ont un appétit réduit, mais elles grandissent rapidement, et sont difficilement détectables. Comme si chaque type de papillon choisissait dans mes cultures les feuilles les plus assorties à leurs chenilles pour pondre leurs oeufs, de sorte qu’elles se confondent parfaitement pour tromper le prédateur (moi). À moins que les chenilles ne prennent la couleur de ce qu’elles mangent…

4

Je bouture un plan de patate douce dans le système d’hydroponie. Une dernière chance pour les patates de servir à quelque chose (les feuilles sont comestibles).
J’ai réparé le four, qui s’était abimé suite à des coups de vent, et l’ai installé près de la cabane de Canard.
Depuis 3 mois, il bloquait le coin Sud-Est du périph. Plusieurs fois j’ai failli tomber. Il est maintenant plus accessible car proche du camp et donne même un peu d’ombre à Canard. Cette action arrive un peu tard, surtout que depuis l’arrêt des patates, je ne m’en sert presque plus.

5

Le soir, un coup de vent violent le met à terre. Les réflecteurs se cassent. Heureusement la vitre a tenu bon. Je le répare à nouveau.
J’ai positionné le bulleur de la spiruline au dessus de la bigbox1 des grillons et le bulleur des biofiltres au dessus de la spiruline. Ainsi le dioxyde de carbone émis par les grillons alimentera la spiruline pour leur photosynthèse, et l’oxygène émis par la spiruline alimentera les bactéries des biofiltres. Je ne pourrai malheureusement pas mesurer le gain de rendement dû à cette synergie. Mais je suis content d’imaginer qu’une forme de solidarité est née entre les acteurs de l’écosystème.

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J’ai collecté 3 litres d’eau. C’est décevant. Mais la journée a été assez nuageuse et le goutte à goutte est trop faible.
JOUR 92
Je donnais trop de nourriture aux grillons. Ils la dispersaient dans les boites d’oeufs. Je m’en suis rendu compte en nettoyant leur boite. Je leur donne maintenant sur un plateau pour qu’ils la consomment sur place. Cela me permet de voir quand ils ont terminé leur portion.
Il y a des grillons partout sur la plateforme. Surtout dans le camp. De toutes les tailles.
Un orage éclate dans l’après midi.
Je collecte à nouveau 3 litres du dessalinisateur. J’espère que pour le prochain essai la météo sera meilleure.
Collecte record de feuilles : 116g. 100g de feuilles issues du système d’hydroponie, et 16g de jeunes pousses. Je suis confiant. Mon objectif est de collecter entre 100 et 150g par jour jusqu’à la fin de l’expérience. La culture de jeunes pousses est facile, mais je me rends compte que le rendement n’est pas si intéressant : 3,5g de graines donnent seulement 10 à 20g de jeunes pousses. Or, les graines coûtent relativement cher.

7

Aucune collecte de champignons depuis 2 semaines. Cause : j’ai arrêté de vaporiser de l’eau en journée. Avec la chaleur, cela a du bloquer leurs naissances. Je vais reprendre.
À partir de maintenant, je vais me lever à 3h30. Je commencerai la routine à 6h30. Comme ça, j’aurai le temps de l’achever avant le coup de chaud de 8h30.

JOUR 93
Les journées sont de plus en plus nuageuses. Je ne peux pas tester le dessalinisateur.
Collecte des grillons de la SB1. Il y a seulement 61g. C’est normal que ce soit faible car je les ai gardés beaucoup trop longtemps.
Leur goût n’est pas terrible. J’aurais du les cuire plus longtemps. Tui leur donnait un régime à base de patates les derniers jours pour qu’ils aient bon goût.
Je suis allé sur la plage pour faire une première expérience de transformation de plastique en carburant. J’ai commencé par m’attaquer aux sacs en polypropylène. Il y en a une quantité incroyable. Dans l’eau, dans le sable ou enguirlandés aux branches. Les ramasser est rapide, par contre les nettoyer des impuretés m’a pris beaucoup de temps. J’ai donc repoussé l’expérience à demain. De toute façon j’avais oublié de prendre un briquet.

8

Les amarantes ne poussent pas bien. J’en ai sorti une d’un sac. Peut être que leurs racines sont trop contraintes par le sac ? À moins qu’elles ne se soient pas remises de la crise des araignées rouges ? Peut être aussi parce qu’elles manquent d’eau ? Le système de goutte à goutte ne paraît pas très fiable. Elles ont perdu le statut de plus belles plantes de la serre. Ce sont les morning glory qui se développent le mieux.

9

JOUR 94
J’ai mis les champignons en lactofermentation le jour 73. Il y a 3 semaines. Je peux donc commencer à les consommer. C’est bon, acide, avec un petit goût de fermentation alcoolique. Ce sera parfait pour accompagner mon plat traditionnel.

10

Je retourne sur la plage pour l’essai de pyrolyse. Je fais un feu dans le réchaud avec du bois trouvé sur la plage. Je remplis la boite principale avec des sacs en polypropylène. En chauffant, le plastique doit se transformer en gaz et se condenser dans les 3 plus petites boîtes.
Après 1h30 je stoppe l’essai. Les boites n’ont pas bien chauffé. Je pense que le feu était trop faible. Après ouverture de la boîte principale je constate qu’une partie seulement du plastique a fondu. Il n’y a que quelques millilitres de carburant dans les autres boites. Il faudra que je trouve un moyen de faire un feu plus fort et éventuellement d’isoler thermiquement la boîte principale.
Je soude les connections électriques de la minuterie car tout sautait dès que je bougeais la boîte. J’en profite pour réparer pour la énième fois mon casque audio, devenu un vrai symbole de la lutte contre l’obsolescence programmée.
Je soude aussi une deuxième cellule Li-Ion à une powerbank. Une seule cellule suffit pour alimenter une lampe, mais pas pour recharger mon téléphone. 2 cellules devraient le permettre.

LOW-TECH TO DO LIST
Pour la semaine prochaine je mets en priorité les tests suivants :

  • pyrolyse du plastique
  • test de powerbank pour recharge de téléphone
  • tests de dessalinisateur
  • test du thermos
  • tests du pédalier génératrice

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